Olmert confirme implicitement qu'Israël détient la bombe nucléaire

Publié le par MRAP Moselle


Israël et la bombe

Un article du quotidien Le Monde. 13.12.06
   
 Depuis des décennies, c'est un secret de Polichinelle : Israël est une puissance nucléaire militaire. Mais il était de bon ton de ne pas en parler. Les Israéliens maintenaient ce que Shimon Pérès, considéré comme le "père" de la bombe israélienne, appelle une "politique d'ambiguïté". Pourquoi le premier ministre israélien, Ehoud Olmert, s'adressant, lundi 11 décembre, à des journalistes allemands, a-t-il rompu cette consigne du silence ? Peut-être l'a-t-il fait simplement par inadvertance. Alors qu'il énumérait les Etats dotés de l'arme nucléaire - Etats-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne, Chine -, il a ajouté benoîtement Israël à la liste sans que personne ne lui demande rien.

Cet aveu en forme de lapsus ne pouvait pas tomber à un plus mauvais moment. La communauté internationale essaie depuis plus de trois ans de décourager l'Iran d'utiliser son programme nucléaire civil pour se doter de l'arme atomique. Un de ses principaux arguments est le risque de prolifération dans une région méfiante à l'égard des velléités hégémoniques iraniennes. De son côté, Israël s'alarme évidemment des discours antisémites du président Ahmadinejad. Quant aux dirigeants - sunnites - des Etats arabes, ils se méfient de l'expansionnisme chiite et perse : les six monarchies du Golfe viennent d'ailleurs de décider d'un programme de recherche nucléaire civile.

Cette réponse s'adresse autant à Téhéran qu'à Jérusalem. Si les Arabes avaient voulu se lancer dans le nucléaire pour contrer l'arsenal israélien, ils en avaient depuis longtemps l'occasion. La bombe israélienne est un fait depuis la fin des années 1960. Israël a développé son programme de recherche civilo-militaire à partir de 1956 avec l'aide du gouvernement français de l'époque, dirigé par le socialiste Guy Mollet, en partie à l'insu des Américains. L'Etat hébreu s'est toujours refusé à signer le traité de non-prolifération nucléaire, conclu en 1968, que la communauté internationale oppose aujourd'hui à l'Iran.

Si les déclarations de M. Olmert ne changent rien à la réalité, elles apportent de nouveaux arguments aux Etats qui veulent garantir leur sécurité en possédant l'arme nucléaire et qui considèrent, au moins implicitement, que le régime de non-prolifération a vécu.

Il reste un argument qu'au début de la guerre froide on entendait aux Etats-Unis à l'adresse de l'URSS et qui pourrait refaire surface : la dangerosité de la bombe atomique ne dépend pas de l'arme en soi, mais de la nature du régime qui la possède. Bien qu'il ne soit pas dépourvu de tout fondement, l'argument est spécieux. Il renforce la pratique deux poids deux mesures que ne supportent plus les pays émergents. Et il occulte le fait que, dans l'histoire, les seuls à avoir utilisé l'arme atomique sont les Américains.

Publié dans Proche et Moyen-Orient

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