Ahmed, demandeur d'asile algérien, menacé d'expulsion

Le Républicain Lorrain du 17/06/06. Page METZ. Article d'Emmanuelle de Rosa
Vivre caché… juste pour vivre
Le MRAP s'est saisi du douloureux cas d'Ahmed, Algérien arrivé à Metz il y a 5 ans et menacé d'expulsion malgré une santé défaillante.
Quand il croise la police, Ahmed baisse les yeux et son coeur s'emballe. Pour-tant, il n'a jamais volé, jamais eu de problèmes avec la justice, a toujours payé ses impôts. Mais aujourd'hui, il doit se cacher pour vivre. La préfecture l'a invité à quitter le territoire depuis janvier dernier. Le MRAP s'est ému de son cas car Ahmed est malade. Commerçant en Algérie, il explique avoir fui parce qu'il était racketté par le FIS. Dès son arrivée en France - et à Metz - en 2001, il formule une demande d'asile (qui sera refusée). Hébergé dans un foyer, il y contracte l'hépatite B, une maladie qui ne le quitte plus. Le temps de ses démarches, il ob-tient une carte de séjour d'un an, avec autorisation de travailler. Ce qu'il fait. Il travaille, prend un appartement, paie ses impôts. Sa carte de séjour expirée, il obtient un nouveau titre de séjour de 3 mois pour raisons médicales, puis d'un mois, puis plus rien.
Asile «médical»
Malgré des certificats médicaux attestant la fragilité de son état (problèmes de poumons, de gorge, de dos, séquelles de tuberculose) et l'incompatibilité avec une mesure de garde à vue ou de rétention administrative, la préfecture lui demande de quitter le territoire. « Il résulte de l'avis du médecin inspecteur départe-mental de la santé que vous pouvez bénéficier d'un traitement approprié à votre état de santé dans notre pays d'origine », justifie la préfecture. « En juillet 2005, on me donne une autorisation pour raisons médicales, mais plus en décembre, s'interroge-t-il, par un médecin qui ne m'a même pas examiné ! » Ahmed reste d'autant plus perplexe qu'il affirme qu'une partie de son traitement n'est pas disponible en Algérie et que le médecin qui le suit depuis 5 ans a préconisé un suivi étroit de son état.
Depuis janvier, il est donc passé dans la clandestinité. Plus de travail, plus d'appartement, plus de carte vitale, plus de CMU. Ahmed est hébergé à droite et à gauche, chez des amis. Il se cache dans l'attente de connaître la décision du tribunal administratif qui doit étudier son recours en annulation de la décision préfectorale. Une procédure qui n'est pas suspensive de la menace d'expulsion. « Ça fait 5 ans que je suis là, j'ai toujours travaillé. jamais eu de problème. J'ai reconstruit ma vie ici et je veux rester là. »
Le MRAP, le CASAM, les élus Dominique Gros et Denis Jacquat sont intervenus en sa faveur, alertant le préfet sur son cas. Aucune réponse n'a été donnée. Sans espoir, Ahmed confie désormais son sort au destin. « Peut-être que ça ira ».
Ce sera l'expulsion
Julien Charles, directeur de cabinet du préfet a repris à notre demande le dossier concerné. « La demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA puis par la commission de recours des réfugiés », rappelle-t-il, précisant qu'en 2003, une autorisation provisoire de séjour pour raisons de santé avait été accordée. Puis, en mars 2005, « le médecin de la DDASS a conclu qu'il pouvait bénéficier de soins appropriés dans son pays ». De nouveaux certificats ont alors été produits et le MRAP a soulevé le problème des médicaments non disponibles en Algérie. « Cet argument a été donné au médecin de la DDASS avant qu'il ne réexamine la personne. » Et la conclusion a été la même qu'en 2005. Du coup, « pour nous, rien ne s'oppose à un retour dans son pays puisque le médecin a émis deux fois le même avis. » Ce sera donc l'expulsion.